Star Wars, ou la nostalgie de l’avenir

« Impossible à prédire est l’avenir », énonce dans son baragouin le sage Yoda. Tu ne crois pas si bien dire. « Il est tout pourri son hologramme », assènent mes fils dans un français guère plus correct. Dans Star Wars, en effet, les projections holographiques tressautent comme de bonnes vieilles images vidéo noir et blanc des années 1950. Une figure de style typique du réalisme lucasien, qui consiste à « salir » la représentation pour la rendre plus crédible.

Problème: la manifestation du « bruit » de la transmission reproduit un effet de sautillement caractéristique du signal électronique, qui a totalement disparu des écrans. Plus habitués à l’affichage à retardement de quelques paquets de pixels, trace d’une inhomogénéité de diffusion, mes enfants n’ont jamais vu l’image qui leur permettrait de comprendre ce clin d’œil référentiel, issu du passé de George Lucas.

On l’avait déjà vu avec les androïdes de Blade Runner, rien ne vieillit plus vite que l’avenir.

5 réflexions au sujet de « Star Wars, ou la nostalgie de l’avenir »

  1. Revu Gattaca il y a deux jours. L’affichage du profil des individus sur l’écran, après prise de sang ou d’autre liquide corporel, m’a stupéfaite. Il y a aussi l’effet de vieille vidéo mêlé au suspens machine à sous (verra-t-on apparaître deux bananes et un ananas ou trois cerises? ah non, Jerome Morrow, « valide », tout va bien). Est-ce que cette chose-là était déjà vieille à la sortie du film? Elle me frappe aujourd’hui…

  2. « rien ne vieillit plus vite que l’avenir ».

    Et rien ne démode plus que la mode.

    Donc, ça fait quarante ans (depuis les pattes d’eph’ et les cols pelle à tarte où je me suis ridiculisé) que je ne la suis plus et fais dans le classique indémodable.

    Moi, ce qui m’énerve le plus, c’est que les produits rendus obsolètes par le produit qui suit est inutilisable : je peux toujours lire mes vieux 78t, je ne peux plus utiliser les disquettes de mon vieux Classic II.

    Pour l’orthographe de vos fils, je confirme (pas taper, AG, ou alors, avec une télécommande, surtout qu’ils s’en tirent mieux que la moyenne) !

  3. @Séverine: C’est aussi l’illusion de la toute-puissance génétique qui a pris un coup de vieux. Mais ce qui est intéressant dans ta remarque, c’est à quel point l’expérience récente nous a doté d’un capital de connaissances qui valide ou invalide certains usages de l’image. C’est une accélération étonnante.

    @PMB: Lire les 78 tours est une chose (qui n’est certainement plus possible dans la plupart des salons d’aujourd’hui). Mais vous arrive-t-il d’écouter un 78 tours pour la musique? L’écoutez-vous comme un disque ou comme une archive? J’ai l’impression que l’accélération du rythme de renouvellement de nos outils de consultation va de pair avec une évolution du goût, calé notamment sur des critères techniques. Remonter le temps de cette manière n’est-il pas le plus souvent un exercice artificiel?

  4. @AG : Quant aux évolutions des goûts, les habitudes façonnent les sens.
    On peut je crois faire la même observation avec le rapport au flou ou au grain (au bruit) photographique.

Les commentaires sont fermés.