Culture Visuelle, peinture fraîche

Culture Visuelle a ouvert sa version de préfiguration le 9 novembre 2009. Après six mois d’efforts de l’équipe fondatrice, nous avons le plaisir d’annoncer le lancement de la version 1.0 de la plate-forme. Je remercie avec chaleur tous les auteurs, éditeurs, graphiste, développeur, ingénieurs, conseillers et betatesteurs (avec le précieux soutien technique de nos amis de 22mars, créateurs d’Owni ou de Paris Tech Review), qui ont participé avec l’enthousiasme des débuts à la création de ce nouveau format de publication: le premier média social d’enseignement et de recherche français.

Les nouveaux matériaux de la recherche

Un outil de publication simple et puissant, adapté aux nouveaux besoins de la recherche: tel était le cahier des charges initial du projet, traduction d’une demande élémentaire. Avec la démocratisation sans précédent des ressources multimédias, un fossé s’est creusé entre les moyens de publication classiques et les pratiques de l’enseignement et de la recherche. Je viens de recevoir la version papier d’un de mes articles, publié dans un recueil collectif. Une parution parfaitement représentative de l’état le plus courant de l’édition universitaire, mais qui n’a pu accueillir que 5 reproductions photographiques en noir et blanc (voir ci-dessous).

En ligne depuis dix mois, accessible gratuitement dans le monde entier, la version électronique de cet article a été reprise récemment sur Culture Visuelle, avec 37 illustrations couleur (voir ci-dessus). On pourra juger en le consultant si cette débauche iconographique est un luxe inutile ou bien si elle permet de documenter de façon plus précise une démonstration d’histoire culturelle. Encore est-on ici dans un registre où les comparaisons avec l’édition papier sont possibles. La mobilisation de documents audio, d’extraits vidéos ou de diaporamas, qui sont désormais monnaie courante dans l’exercice de l’enseignement, contribuent à creuser l’écart en faveur des organes en ligne.

Publier un équivalent du matériel utilisé en séminaire exige de pouvoir répondre à des conditions précises, en termes de simplicité d’usage, de confort de lecture ou de sécurité juridique. Culture Visuelle s’efforce de fournir un environnement adapté à ces besoins, par une maquette spécialement développée, un serveur puissant et la capacité de restreindre l’accès aux images sans prohiber la lecture du texte. Les possibilités de mise en page et de mobilisation des contenus multimédias permises par l’interface de Culture Visuelle représentent un saut qualitatif sans équivalent dans l’univers des publications académiques.

Un nouveau format scientifique

Mais le projet Culture Visuelle ne s’arrête pas à cette mise à jour des capacités de traitement des contenus. L’édition électronique universitaire se borne aujourd’hui trop souvent à l’émulation en ligne des mécanismes classiques des revues savantes, avec leur système de livraisons périodiques et de sélection a priori par comité de lecture interposé. Or, ce sont les contraintes du papier qui ont conduit à restreindre la publication aux seuls résultats et expressions achevées du travail scientifique. Celui-ci existe sous bien d’autres formes, dont l’appréciation est en principe réservée aux membres des laboratoires ou aux participants des séminaires de recherche.

Culture Visuelle ne vise pas à reproduire le modèle canonique de la revue peer-reviewed, mais à cultiver la recherche en train de se faire. Grâce aux outils numériques, la plate-forme crée une nouvelle strate de visibilité du travail savant, renouant avec des modèles plus anciens, comme les célèbres Comptes rendus de l’Académie des sciences créés en 1835 par le génial Arago – lieu de présentation des travaux et des questionnements, de commentaires et de débats, à un rythme soutenu.

L’application des capacités interactives du web 2.0 aux échanges de la recherche offre un triple bénéfice. Par ses effets d’irrigation multiples, elle constitue un puissant accélérateur de la réflexion. En encourageant les novices à participer à la joute, elle agit comme un entraîneur aux immenses vertus pédagogiques. Enfin, à un moment où les débats sont vifs sur la place de la science dans la cité, elle restitue une visibilité aux conditions fondamentales de l’exercice savant, qui ne sont ni l’exclusion ni le dogme, mais la curiosité et le partage, le questionnement et le doute.

Une ferme de blogs communautaire

Appuyée sur une expérience préalable de plusieurs années, menée au sein du blog Actualités de la recherche en histoire visuelle, Culture Visuelle propose un ensemble de nouveaux points de repère, qui font système: l’unité de base du blog, qui restitue à l’auteur-chercheur le rôle fondamental de propulseur, le format rédactionnel de la note, qui permet de donner une forme publique aux premiers stades de la recherche, la gestion communautaire, qui transforme la publication isolée en véritable activité de laboratoire.

A partir d’une ferme de blogs de chercheurs, d’enseignants et d’étudiants, aujourd’hui composée de quelque 70 contributeurs, qui travaillent et dialoguent à ciel ouvert, Culture Visuelle produit une publication collaborative thématique, dédiée à l’exploration des formes visuelles de la culture. Chaque membre est libre de publier tout contenu et de créer tout groupe ou ressource collective, dans le respect des obligations légales et des usages académiques. Un comité éditorial structure la production de la plate-forme a posteriori, en sélectionnant quotidiennement les billets susceptibles d’intéresser la communauté et en les classant selon un système de rubriques et de tags. S’appuyant sur les derniers développements des systèmes multi-utilisateurs, cette plate-forme comprend en outre son propre réseau social, qui ouvre de nouvelles possibilités d’échange et permet d’associer les lecteurs.

Diverses mentions et reprises de billets de Culture Visuelle sur Rezo, InternetActu, Owni ou Arrêt sur images.

Parmi ses nombreux bénéfices, la forme communautaire donne une assise robuste à la pratique de la publication en ligne. Malgré les protestations de simplicité des outils numériques, leur usage pour les débutants reste une source de préoccupations. Par l’intermédiaire du réseau social, la communauté remplit ici une fonction de formation et de tutorat. Elle fait également profiter chacun des participants de la visibilité que confère sur le web une production de qualité. Bénéficiant dès à présent d’une indexation flatteuse, parfaitement intégrée aux différents systèmes de signalement sociaux, Culture Visuelle fournit une très bonne exposition aux travaux de ses membres, favorisant leur identification par les spécialistes.

Testée depuis six mois, Culture Visuelle ouvre aujourd’hui sa version publique et attend votre participation, comme lecteur ou comme auteur, à ses divers outils de communication et de partage. Grâce au concours de ses membres, le développement de la plate-forme se poursuivra, avec pour ambition de fournir, sinon le meilleur environnement éditorial pour la pratique contemporaine de la recherche, du moins l’un de ses ateliers privilégiés. Un pot d’inauguration est proposé le 19 mai à 18h à l’INHA (2 rue Vivienne, Paris). Vous y êtes cordialement invité.

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7 réflexions au sujet de « Culture Visuelle, peinture fraîche »

  1. Dommage pour le 19 mai. J’aurais aimé être de la fête, mais mes obligations universitaires me retiendront à Tours. Faites-nous des photos !

  2. « Le durcissement actuel de l’évaluation de l’activité scientifique n’est-il pas un frein majeur à l’ouverture des systèmes de lecture et d’écriture des travaux scientifiques?
    (…) Quelles sont les dérives de la communication médiatisée par la technique? (…) Le cercle vertueux procuré par la «présence Web2.0» des scientifiques sur le net ne se traduit-il pas essentiellement par un certain nombre d’invitations, de sollicitations à des conférences et à l’écriture d’articles, ces effets positifs participent-ils au renouvellement du débat d’idées ? »
    http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00424826/fr/
    😉

  3. Je profite de ta question pour répondre sur le fond à propos de l’évaluation et des blogs, interrogation qui provient à mon avis d’un rapprochement inadéquat.

    Les activités évaluées concernent les résultats (= les publications). Mais toute l’activité de préparation et de recherche (ce que j’appelle le « séminaire permanent »), ne fait pas et ne fera jamais l’objet d’une évaluation. C’est ce travail auquel le web 2.0 procure un espace un peu plus large. Le blog n’est qu’une extension de nos activités habituelles, les murs en moins. Opposer partage et publications est un réflexe compréhensible, mais idiot. Les premières préparent les secondes aussi sûrement que l’os à moelle annonce le pot au feu – car ce que nous produisons sur nos blogs sont bien des matériaux de la recherche.

  4. Monsieur Gunthert,

    Ravie je suis de vous retrouver sur cette branche, après être tombée un peu par hasard sur Histoire visuelle.
    Vos travaux m’intéressent beaucoup, je ne fais que découvrir ce carnet et je reviendrais avec plus de temps par ici.

    Cordialement,

  5. Je suis trop éloigné (géographiquement) pour vous rejoindre. Je me servirai un apéro nain à votre santé 😉

    Bravo à cette plate-forme bouillonnante qu’est devenue CV. Qu’elle continue longtemps à nous stimuler et qu’elle serve d’exemple à d’autres institutions! Merci aussi à CV de m’accueillir de temps en temps, quand j’ai l’occasion de pondre un billet.

    Allez… je vous fais la bise!

  6. Cher M. Gunthert,
    Ravie de cette ouverture et surtout ravie de ce pot !! bcp de monde sympa et un très bon ambiance… Culture visuelle c’est une idée géniale !

    « Le monde appartient à ceux qui le pensent » ! 😉
    Francesca

    (Vale, nous on se retrouve bientôt)

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